Journal de Nogent le Rotrou
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ma vie dans le Perche
Propos sur la littérature et la peinture.
lundi 17 juillet 2006 jour précédent jour suivant retour au menu
Comment faire le tour du monde en restant à Thiron-Gardais.

Je l'ai ramassée tôt le matin sur le chemin à une centaine de mètres de la Chambrie.
C'est une petite fleur bleue de rien du tout et que je détermine aussitôt rentré, volets fermé, canicule oblige, comme étant la Campanule à feuilles rondes, Campanula rontundifolia de la famille des Campanulacées (voir l'herbier dans dans les Cantonales...)
Son nom vient de ses fleurs qui ont la forme d'une petite cloche ou clochette.
En effet en bas latin campana veut dire cloche et campanula petite cloche (comme en italien aujourd'hui).
De là les mots et leur histoire m'ont embarqué pour un long voyage aussi bien à travers le monde que dans mon passé.
1- La campane
La campane est un vieux mot pour dire une cloche, notamment dans certaines régions. On peut lire ainsi dans Regain de Giono : " Une campane d'argent. Le clocher bleu (...), voilà sa campane qui sonne l'angélus avec la voix d'une clochasse de bouc .".
Dans les régions du Centre, de la Bresse ou de l'Anjou, la campane, c'est la cloche qui pend autour du cou des animaux, comme sur cette lithographie de Pierre Rousia, intitulée Setter anglais à la campane où l'on voit bien la campane et le collier qui la tient.

De là on trouve dans l'ébénisterie la campane comme motif décoratif en forme de clochette pour adoucir la rigidité d'une traverse de siège ou d'un bas d'armoire. Dans l'ornement sculpté pendent des houppes en forme de clochettes, et qui décore ainsi le dais d'un trône, d'un autel, d'une chaire.

En architecture la campane peut désigner les chapiteaux (sommets des colonnes) quand ils ont la forme d'une cloche. On rencontre une campane essentiellement dans certains chapiteaux égyptiens ou certains chapiteaux corinthiens.

En passementerie aussi, on faisait autrefois de nombreuses campanes en fils d'or ou d'argent, longues séries de glands en forme de clochettes, pour décorer par exemple des lits...

Enfin au Moyen-Âge, on pouvait écouter les campaniers, sonneurs de cloches, comme on peut en voir encore au festival des Vésubiales à Roquebillière. Je conseille de lire la page faites par les collégiens du village sur l'art campanaire et devenir un campanologue averti.
Étonnant qu'il n'existe pas le verbe se faire campaner, qui indiquerait bien sûr se faire sonner les cloches.
Dommage.
2- Campanulé ou campaniforme (avec aussi campanuliforme, une forme rare) :
Ce sont des adjectifs qui qualifient la forme de cloche, qu'elle soit d'ailleurs à l'endroit ou renversée.
On peut l'appliquer à la corolle d'une fleur, comme à un à un chapiteau égyptien (La campane est retournée, et la partie amincie du fût s'enfonce dans le socle).
3- Campanile.
Cela vient de l'italien campanile pour indiquer la tour, carrée ou ronde, construite près d'une église pour servie de clocher. (On peut en français utiliser dans le même sens le mot beffroi, mais qui avait au Moyen-Âge d'autres rôles, comme entre autre, servir de tour de garde...) Ils ont le campanile sans doute le plus célèbre du monde avec La tour de Pise, de style roman destinée à recevoir les cloches de la cathédrale dont la construction débuta en 1064.
Je préfère, à cause de souvenirs amoureux, celui de la place Saint-Marc à Venise, où celui de Florence.
Mais celui qui m'est le plus familier et chargé de souvenir est le campanile de Berkeley,(qui s'appelle aussi la Sather tower, du haut de laquelle on a une belle vue sur la baie de San Francisco et sur Oakland) situé dans le campus de l'Université, celle où je suis allé pendant 6 ans, de 1973 à 1979, écouter Zawinul et son Weather report, léonard Cohen, voir les films quand à chaque fois ils invitaient leur metteur en scène, écouter des conférences inoubliables. C'est ainsi que j'ai rencontré Godard, Eustache, Eugène Ionesco, Félix Guattari etc...
Mais le campanile, c'est aussi la cage en fer forgé pouvant recevoir une horloge ou une cloche, et que l'on trouve par exemple en Provence et dont plusieurs livres vantent la beauté et le mérite. Dans cette région, ils apparaissent dès le début du XVIème siècle (Aix en Provence 1511, Avignon 1562, Carpentras 1576...) et ont une apogée au XVIIIè et XIXè siècle.
De nombreux sites leur sont consacrés (exemple).
Je ne peux finir sans rappeler le campanilisme, cet esprit de clocher que l'on connaît tous à la campagne, cet attachement excessif à son village natal.
À lire en ces temps chauds le célèbre blog des correcteurs du monde, ainsi que ses commentaires, sur ce qu'ils appellent aussi " l'esprit de campanile ".
Dans mon introduction à mon herbier de la Chambrie, j'ai écrit : " Si vous voulez perdre un homme, donnez-lui une flore et la plante qui est à ses pieds. Cet homme-là entre dans un monde infini et passionnant."
Je fus cet homme-là aujourd'hui.
J'en ai oublié de parler de ma petite fleur bleue, qui elle-même m'a entraîné de la céramique otamane du XVIème siècle, aux vases de la cristallerie Daum du début de siècle, en passant par les cartons des chocolats d'Aiguebelle...