Journal de Nogent le Rotrou
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ma vie dans le Perche
Propos sur la littérature et la peinture.
jeudi 3 août 2006 jour précédent jour suivant retour au menu
Trop rien encore ?
la nuit dernière, c'est la première fois que 6 personnes ont dormi à la Chambrie.
Après le barbecue (poulet/chipolatas/courgettes) on a fait une ballade dans les champs au soleil couchant.
Sur les hauteurs du plateau, et avant de redescendre vers l'étang de Sainte-Anne, on a fait une dernière photo.
On pourrait la résumer ainsi : il y avait dessus 5 Bourdais sur les 13 qui doivent encore, si mes calculs sont bons, (en comptant les divorces où certaines femmes ont repris leur nom de " jeune fille " et ceux où elles ont gardé le nom de leurs enfants, et en comptant les filles qui se sont mariées et ont pris le nom de leur mari...) s'appeler Bourdais.
Il y avait donc , de gauche à droite, Jany, Jean-Claude, Léa, Charlotte et Élise Bourdais. Pour les décrypteurs avertis, on peut connaître quelques détails supplémentaires en regardant le ciel.
Si on est perspicace, on peut commencer à voir certaines complications de cette famille et que le ciel était, vu de ce côté là, bien aux couleurs du soir.
Mais ce que portait le champ de chaume en dessous était aussi instructif, et constituait ce qu'on peut dire le sujet de la photo.
Mais est-ce si sûr si on y réfléchit un peu ?
Si on collait comme autrefois, la photo dans un album en y ajoutant un titre, quel serait-il ?
Sous cette photo-là, on pourrait en fait en mettre plusieurs, et qui varieraient aussi selon le collectionneur :
- Soirée à la Chambrie, été 2006.
- Retrouvailles Jany Élise à La Chambrie, été 2006. (En effet Élise et Jany ne s'étaient pas vus depuis au moins 7 ans...)
- Départ Jany au Vietnam, été 2006.
- Vacances des filles à La Chambrie, 1ère quinzaine d'août 2006.(ce qui est notable, puisque le reste de l'année elles vivent séparées avec leur mère respectable, et j'essaie chaque année de les réunir un maximum de temps ensemble et avec moi...)
Si maintenant je me pose la question de savoir pourquoi j'ai demandé de prendre cette photo, les réponses possibles, et je ne considère que les conscientes, peuvent être aussi multiples. La première qui me vient à l'esprit est :
- Pour garder une trace de cette journée-là. Comme toutes les photos que je fais quotidiennement depuis longtemps, sortes de pense-bête, de notes, de documents bruts, d'étiquettes, de relevés de compte, que j'accumule en me disant " j'en ferai quelque chose plus tard ", " ça sera peut-être utile ", ou " comme ça je n'oublierai pas cet instant "... et, si j'en crois René Char, pour rêver ( " Un poète doit laisser des traces de son passage, non des preuves. Seules les traces font rêver.")
Je pense aussi à Kenneth White : " On ne peut tout de même pas se contenter d'aller et venir ainsi sans souffler mot " .
Faire des photos, manière de me faire croire que je suis encore vivant, debout, que mon regard n'est pas encore éteint, que la lumière du monde excite encore ma rétine intérieure.
Cela fait partie de mon travail de vivre, un effort de ne pas me laisser aller, de croire encore à quelque chose, et, comme disait Georges Henein de l'écriture, " une façon de veiller. De veiller sur soi et de veiller tout court. À rêves déployés. Une chance de rester pur. Ou moins impur..."
Mais une photo , on le sait, même si elle ne contient pour chacun de nous que ce que l'on veut ou peut y voir, contient toujours plus que ce qu'elle montre.
Il y a aussi dans cette photo, par exemple, le ciel auquel nous faisions face au même instant, nous les poseurs, le ciel du couchant derrière le champ de maïs, dans le dos de la photographe.
Photographier avant-hier l'araignée et le lérot du jardin, hier matin les mûres et hier soir trois enfants devant deux adultes, est pour moi un sursaut de courage.
De celui bien sûr dont parle Michaux, "
de la sorte de courage qu'il faut pour être rien et rien que rien..."

C'est bien là mon problème.
Je n'accepte pas encore, et je résiste, c'est plus fort que moi encore, à ce rien.
Je sais que j'ai tort, mais je m'entête à ne pas accepter qu'il n'y ait, à ce point RIEN.
Le dernier livre que j'avais publié chez Chambelland, s'appelait Trop rien.
Mais justement TROP RIEN, ce n'est pas RIEN, et ce n'est plus RIEN.
C'est juste TROP.