Journal de Nogent le Rotrou
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ma vie dans le Perche
Propos sur la littérature et la peinture.
Dimanche 15 octobre 2006 jour précédent jour suivant retour au menu
D'un village à l'autre, un dimanche.
Des livres, des fossiles, des courges...et des miracles.

1-À Bretoncelles.
Petit village de 1400 habitants, où je passais souvent pour aller de Nogent le Rotrou à Verneuil sur Avre, voir ma mère, (en passant à la Ferté-Vidame, fief de Saint-Simon).
Pour Lire en fête, ils ont eu le mérite et le courage d'organiser sur 3 jours, tout un programme autour du livre. Dans la salle des fêtes et dans la bibliothèque municipale. Conférences, expositions, ateliers pour enfants, libraires, et écrivains et dessinateurs, qui dédicacent leurs livres...
Vraiment courageux, je le répète. Étais content d'y aller, en supporter et militant, dirais-je. Et je n'ai pas regretté.
Plus de monde que je ne l'aurais supposé...
Comme quoi, même des livres peuvent constituer une sortie le dimanche après-midi dans un village perdu au fond de l'Eure et Loir et "attirer" du monde.
Il suffit peut-être d'y croire, et de faire.
Les livres faits par les enfants étaient comme souvent étonnants, et l'atelier sur l'astronomie avait beaucoup de succès. Ah, l'univers ! Yeux ronds et bouche bée...
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Rencontre avec une charmante femme qui s'appelle Brig Laugier et qui fait des livres sculptures vraiment beaux. On se reverra puisqu'elle habite dans le coin. Lui achèterai sans doute une oeuvre.
... ...
(À sa demande, j'indique que les reproductions de ces photos sont interdites.)
Il y avait aussi l'exposition de tout un tas de carnets de voyages, (de gens qui se sont groupés dans une association), dont certains étaient impressionnants.
Discussion avec Ginette Jollivet dont j'aime les carnets sur le Vietnam et la Chine.
Devant cette table de carnets je pense aux carnets de Fred Griot mais je lui parle des carnets de Delacroix. Elle les connaît (ceux d'Eugène qui est au Louvre, pas ceux de Jean-Etienne, cultivateur d'asperges), et me dit qu'elle continue de prendre des cours d'aquarelle, que même au bout de 20 ans de carnets, elle a toujours à apprendre...

Je pars, après avoir acheté et fait dédicacer par leurs auteurs et dessinateurs deux livres pour mes filles, un pour Léa et un pour Charlotte.

2-Retour en passant par Nogent le Rotrou.
Dans la salle de la mairie a lieu une exposition de fossiles du Perche.
Peu de monde, mais là encore, deux hommes d'un certain âge, la passion dans les mains et dans ce qu'ils voudraient vous expliquer.
La salle est presque vide, mais ils ont le courage de ne pas montrer leur solitude. Le plus vieux me dit que son regret est que peu d'enfants soient venus. Pendant que je photographie quelques vitrines, je l'entends demander à des gens qui sortent : " Alors, est-ce que vous avez appris quelque chose ? ".

3-Retour à Thiron-Gardais, où c'est ce week-end la Fête de la courge.
Autre ambiance, autres couleurs, autres formes.
Ça commence par l'exposition de Geneviève Le Guével qui peint les citrouilles et potirons de son jardin de Brunelles (à quelques kilomètres de Thiron-Gardais).
Puis ça continue dans les jardins de l'abbaye, par ces cucurbitacées, bien en mode aujourd'hui, je ne sais pas pourquoi, sans doute pour leurs couleurs tape à l'oeil, leur vertu décorative (vous savez, le genre Maison de Marie-Claire à la campagne, ou dans sa résidence secondaire...Il y en a toujours quelque part, sur une table ou un banc, un panier rempli...Dans la famille courge de chez les Courges, je demande le potiron...)
Fait dire que la nature, dans ce cas-là n'a pas hésité à imaginer et bricoler et s'en est donné à coeur joie : courge, potiron, citrouille, giraumon (ou turban turc), coloquinte, calebasse, potimarron, courge musquée, courge de Siam, chayotte (ou christophine), courgette...et autres pâtissons (bonnets de prêtre ou artichauts de Jérusalem).
Allez, envoyez la Courge galeuse d'Eysines :
ou la courge musquée de Provence:
Bref, on a compris qu'on est là dans une famille infernale où il faut s'y connaître pour s'y retrouver.
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J'entame la discussion avec un couple qui avait un étal fait avec goût et bien fourni en variétés. Je découvre l'étendue de mon ignorance (qui devant ce genre de sujet est avivée par une légère culpabilité d'être agrégé de sciences naturelles, et de savoir si peu de choses ). Ils semblent tout savoir et heureux de me faire partager leur savoir (qui visiblement se double d'un savoir faire) et me disent d'ailleurs qu'ils sont les représentants ici de Jardiniers de France, la plus grande association en France de jardiniers mais "amateurs" précise l'homme.
Quand je leur demande si je peux les prendre en photos, ils me disent que oui, un peu étonnés, mais la femme s'écarte aussitôt du mari.
- Mais pourquoi ?
- Oh...je ne suis pas belle...
- Mais si vous êtes belle...et puis vous l'aidez dans cette culture non ?
- Oui...
- Ben alors, y'a pas de raisons...
Elle se rapproche alors de lui, toute contente, et chose formidable, elle lui prend la main dans le dos. On ne voit pas leurs mains derrière eux, mais elles se tiennent.
En allant à Bretoncelles, quelqu'un a raconté à la radio que Pierre Reverdy avait écrit à Jouve qu'il faut attendre un miracle ou rien.
Où est le miracle ce dimanche ? Peut-on seulement reconnaître les miracles ? Ce serait quoi un miracle aujourd'hui ?
Que je me sois arrêté pour pisser dans un bois en revenant de Bretoncelles et qui m'a empêché de rencontrer le tracteur qui coupait la route un kilomètre plus loin, est peut-être un vrai miracle.
Mais comment le savoir ?
Les yeux d'Anna sont encore là et attendent la réponse que je n'ai pas trouvée, la musique de Guillaume de Machaut, juste avant de traverser le chemin creux, a abattu ce qui me restait de force, et cela fait longtemps que je n'avais plus pensé que je n'aime pas les dimanches...
Comment croire ou attendre un miracle?
Quoique, à la limite...
Parler avec des gens de livres à Bretoncelles, de fossiles à Nogent le Rotrou et de courges à Thiron-Gardais, un dimanche après-midi gris et froid, est peut-être en soi un miracle.