Mardi 14 juin 2005 Hier Avant hier
J'ai rencontré Vincent Cordebard en 1987, quand je venais d'arriver à Angoulême, alors qu'il faisait une exposition au Frac situé dans l'Hôtel Saint-Simon. J'avais beaucoup aimé cette rencontre et cet homme de deux ans mon aîné. Nous avions à peine quarante ans.
Je l'ai perdu de vue quand je suis parti trois ans plus tard en Nouvelle-Calédonie, mais jamais oublié. Quand en avril dernier il m'a téléphoné, m'ayant localisé grâce à mon site, c'était comme si je l'avais quitté la veille.
Il cherchait une reproduction de Venus et Mars de Cosimo. Ça tombait bien puisqu'à cette époque je travaillais sur ce peintre et plusieurs de ses tableaux. Je l'avais en réserve et lui avais envoyé. En fait le titre exact est Mars Venus et Cupidon. Daté de 1490, il est aujourd'hui au musée de Berlin. On peut mettre en face le Venus et Mars de Botticelli, peint trois ans plus tôt, et qui est à la National Gallery de Londres.
Une page d'ailleurs que j'aimerais faire un jour, tellement il y a de détails fous dans les deux, et tellement la différence est grande aussi entre les deux. Mais le lapin, le papillon et les colombes chez l'un et les guêpes, chez l'autre, ça me suffit pour avoir envie de regarder de plus prêt. Vénus habillée chez l'un, nue chez l'autre, et les deux types qui dorment à côté... Qu'est-ce qui se passe ? Les femmes sont-elles si ensorceleuses ? C'est quoi l'histoire ?
Je reviens sur Vincent Cordebard. Son parcours est à la fois sinueux et cohérent, aventureux et fidèle. Je serai assez bref car on peut trouver et chercher des détails sur son site personnel. Du vécu sur lequel il est pudique, mais "ceux qui savent, savent ce que cela veut dire".
Dans ces cas là je donne en vrac. Fondateur de galeries, commissaire d'exposition, professeur de math, dialysé pendant trois ans en attendant la greffe du 23 mars 2002, spécialiste des Axolotls et pleurodèles (un rêve d'enfance), boursier du FIACRE, travail en IUFM et dans des FRACS, créateur de logiciel éducatif ("l'Araignée..."), mais avant tout Artiste, toujours, encore et encore...
Son travail se situe toujours au carrefour de l'écriture, la photo, le jeu. Mais il est plus subtil que cela.
Humour, surprise, dérision, tragique sont toujours là.
Quand j'ai un coup de blues nogentais, je vais sur son site.
Quand mes filles sont énervées, je leur laisse visiter L'araignée, "L'Araignée qui pue des pieds", "enfin sur la toile". Un jeu, parcours hypertextuel multimédia dont elles raffolent.
Où, d'autres fois, dans Listeria sûre ! (en sentine) (" Edition revue et augmentée pour le profit de la morale et pour l'édification des familles ") pour entrer dans ce fantastique Tunnel qui commence par la tempête de Giorgione...
Il y aussi, pour leur faire connaître Magritte, Kissékakopié ? (Feuilleton Brownien) , bon pour leur apprendre les liens...
Je ne me lasse pas de ce qu'il appelle ses "travaux d'images"
Photo, gouache, encre, écritures... séries de travaux aux titres toujours évocateurs, alléchants et "forts" :
- Les jours sans fin
- Commerces
- Suite pariétale
- Exécutions sommaires - Les jours sans fin
- Les Attentats à la pudeur
- Conversations faites à un enfant mort
- L'Hypothèse de la guerre
- Sous réserve d'inventaire
- Les Noces d'opale
- Les aventures de Robin Jouet
...
J'aime aussi beaucoup ce qu'il appelle ses "travaux d'écriture"
- L'éternité heureuse,
- La couleur du temps, [ Textes et images ]
- La ligne de partage
- Reconnaissances, [ Texte et images ]
- Aux Iris, (Infinis brefs avec leurs ombres) [ texte intégral ]
- Philippe Agostini, [ Texte ]

« […] Les images ne conservent leur force agissante que si on les considère comme des fragments se dissolvant en même temps qu’elles agissent ou dépérissent rapidement à l’instar des organismes vivants, faibles et mortels. Les images ne possèdent un sens que si on les considère comme des foyers d’énergie et des croisements d’expériences décisives. […] Les œuvres d’art n’acquièrent leur véritable sens que grâce à la force insurrectionnelle qu’elles renferment. » Carl Einstein cité par Didi-Huberman in « Devant le temps », Les Éditions de minuit.
Il faut savoir enfin que Vincent Cordebard a créé un double qui s'appelle Vincent Leplus et qui vit des aventures extraordinaires. La dernière en date vient d'être mise en ligne.
Je la conseille à tous ceux qui apprécient l'humour, les mots, et l'art tout court.
Cela s'appelle Leplus vide son sac.
Je conseille un premier parcours en ne cliquant que sur les "suivant", puis un deuxième en explorant tous les liens. À ce moment là il faut être prêt à tout, comme de passer de la vraie île de Ladé à l'affaire de Trempot...
"Comme les sirènes ou le minotaure, le pouvoir des mots est formé, par un étrange télescopage, de la jonction de corps étrangers et inconciliables." (Jean PAULHAN, les Fleurs de Tarbes) peut-on lire en exergue à Leplus vide son sac.
Le site de Vincent Cordebard est ouvert du soir au matin, sauf les pluies du jour et les fêtes du soir.