samedi 24 novembre 2007 jour précédent jour suivant retour au menu
Encore une sortie décidée au dernier moment
ou : faire un tour à Tours, à la librairie Le Livre, écouter François Bon...

Y'a des week-ends comme ça, qui font peur, sans savoir pourquoi, alors Pourquoi pas me suis-je dit en sortant du collège à 13 heures ?
Après de multiples tentatives près de la gare, auprès de tourangeaux et tourangelles venant de récupérer les enfants à la sortie des écoles, je trouve enfin un jeune qui m'indique que la librairie Le Livre, c'est sur la Place du Grand marché, à côté des halles.
Il suffisait de trouver quelqu'un qui connaissait la réponse ! Finalement, quand j'eus trouvé une place de parking, erré un peu à sentir l'atmosphère, j'ai trouvé la place...et l'endroit.
Je suis alors entré dans un endroit, où cela faisait longtemps que je n'étais pas entré.
Un endroit où on ne vend pas les merdes qu'on voit à la télé ou dans les magazines, mais un endroit où il y a de la littérature. Que de la littérature. Oui oui, ça existe encore.
Pour taquiner le type qui était là, j'ai eu envie de lui demander s'il avait Harry Potter et le Da Vinci code, mais j'ai pas osé. Je lui ai juste demandé, si c'était bien là que devait venir François Bon ce soir. Il m'a dit que oui.
J'ai fait comme chez moi. Tous ceux que je connais depuis 40 ans étaient là.
Ça faisait plaisir de les revoir. Surtout qu'ici, ils n'ont pas à se cacher. Sont carrément allongés sur les tables.
Ici, on montre ce(ux) qu'on aime.
Y'a pas de rubriques d'affichées.
On devine les affinités rapidement : là ce sont les poètes, là ce sont les philosophes, là les étrangers, là les Français etc.
À l'étage, on peut même s'assoir, et feuilleter des revues, et qui n'ont en commun avec celles de mon dentiste à Thiron-Gardais que de ne pas être à vendre ! Juste là pour votre plaisir !
Heureusement qu'il n'y a pas un endroit comme ça à Nogent le Rotrou ! J'y serais toujours fourré et quelle épreuve pour ma carte bleue !
Justement, après trois achats, comme autant de repentirs, il valait mieux que je sorte faire un tour dehors, explorer un peu le vieux Tours et mettre mes cadeaux de Noël dans le coffre...de ma voiture.
Avant huit heures, Evrard Laurent et Martin Arnold, les deux libraires, auront poussé les tables, installé des chaises. François Bon, installe ses machines...Ils s'échangent des nouvelles sur la situation du livre bien sûr...
Les gens, fidèles clients et habitués, arrivent petit à petit, on a l'impression de retrouvailles.
Ce n'est que la deuxième fois que je vais voir François Bon en public. La première c'était à Melle, à l'époque de Daewoo, fin juillet 2005. Aujourd'hui c'est sur Dylan bien sûr.
Il commence à lire des extraits de son livre, d'une manière assez libre, se permettant de rajouter des commentaires, faire des apartés, réussissant au passage à faire rire les gens, au moment où ils ne s'y attendent pas, histoire de dégeler l'atmosphère, installer une certaine intimité.
Ensuite...En suite...ça se complique...
C'est de l'improvistion pure. Même impression qu'à Melle : il part, il revient, il se perd, il nous perd, il nous ferre, il s'enferre. Il se piège, il nous piège. Dylan, on l'entend, on l'imagine, on le découvre, on l'invente comme Dylan lui-même...On s'invente en même temps.
L'écriture est là aussi, les questions, le travail de l'écrivain, comment on fabrique une légende, comment on la déconstruit...Les noms apparaissent, souvenirs pour les uns, inconnus pour les autres...Ginsberg, Bert Jansch, c'est quoi l'Amérique ?, une biographie ça se travaille au présent, la force d'une image, pas de table comme chez Baudelaire, Moon china, les éclats de rire enregistrés, perdre la légende, la reconstruire, 80 paires de boots, vous savez ces chaussures pointues, se faire photographier en clochard à côté de ses 17 maisons, la gravité des chansons de 1963, Rimbaud, le surréalisme, Brecht, Joan Baez... Qu'est-ce ce qu'on a à comprendre de " Ça " ? , le chien Hamlet, Comment on était nous à 23 ans ?, Avec qui jouait-il au go ? Qui c'est ce barge qui s'appelle Andy Warhol ?, Avec quel matériau fabrique-t-on une image ? Vous en avez marre ? Qu'est-ce que je voulais dire ? Est-ce qu'une biographie doit tout dire ? péricardite infectieuse de 97, J'ai pensé appeler le livre Solitude(s) de Dylan , la biographie c'est la digression possible à chaque phrase...La daube de Peter Paul et Mary, vous savez ce qui souffle dans le vent...Echanger une toile de Warhol contre un canapé...
Allez, une petite dernière.
On peut continuer.
On continue.

Et ne voila t-il pas qu'on se met à boire du vin rouge, manger salades et fromages, certains à fumer. Non mais je rêve !
Mais non, pourquoi pas en effet lire Poétique en buvant un verre de Chinon ? Y-a-t-il autre chose à faire un vendredi à onze heures du soir à Tours ? En y réfléchissant bien, comment commencer autrement de manière royale la nuit qui s'annonce ?
Ah, la poèsie, cet obscur désir de l'objet...
Non, je me trompe, comment il disait déjà ?
Dans la voiture, et sur l'autoroute désertée, je me demandais ce qu'un biographe pourrait bien inventer de ma légende, et qu'il serait peut-être temps de m'en fabriquer une.
because something is happening there,
but I don't know what it is...
Do you, Mister John... ?

Mais bon, cela ne semblait pas être le problème des lapins au bord de l'étang de Sainte-Anne, quand je suis arrivé à 3 heures du matin.