dimanche 21 août 2005 Hier Avant hier
Cerisy est terminé,
et la vie continue...

Les ouvriers de la maison ont repris le travail,
Jeudi soir Les Gamins de Paris ont chanté Jolie môme sur la place de Nogent,
Mes filles regardent pour la dixième fois Le Dictateur et La croisière du navigateur...
Leur cahier de devoirs de vacances n'est toujours pas fini...
Je n'ai toujours pas réouvert mon " sac d'école " non plus.
Le repas de ce midi chez ma mère était assez triste. Elle est triste, de vieillir, de s'ennuyer dans son appartement. La visite avec les filles, pourtant calmes avec Charlotte fiévreuse et somnolente, la fatigue. Elle pense à vendre l'appartement et en prendre un plus petit dans une résidence sous surveillance médicale, où elle serait aussi en compagnie d'autres dames de son âge... Je suis triste aussi, d'être incapable de lui remonter le moral, de ne pouvoir lui faire plaisir qu'en mangeant ce qu'elle a préparé (beaucoup trop comme d'habitude) toute la matinée, et en ne repartant pas tout de suite...
J'ai la tête encore prise par l'atelier de Bazille et par ce qui a pu être dit au Colloque de Cerisy.
En fait ce tableau, qui montre, réunis dans un atelier, et avec égalité, tous ceux qui étaient en train d'inventer l'impressionnisme en échangeant leurs idées, leurs expériences et leur passion, n'est pas sans rapport, avec tous ceux qui étaient réunis dans la grande salle de Cerisy et qui faisaient la même chose...mais à propos d'Internet.
Il y a même une manière de voir Cerisy comme une sorte de Salon des refusés...comme celui qu'avaient organisé ceux qui sont représentés dans le tableau...
Je n'avais pas prévu aborder l'atelier de Bazille, rue Condamine avant quelques jours, mais ce dimanche soir (finalement trop calme) s'y prête, pendant que mes filles re-regardent devinez quoi.
Donc : atelier de Bazille première.
Bazille a loué cet atelier en janvier 1868, dans le quartier des Batignolles, 9 rue de la Paix. L'année suivante cette rue sera débaptisée et s'appellera (et c'est son nom encore aujourd'hui) rue de la Condamine. Le tableau s'appelle pour cela Atelier de Bazille, rue de la Condamine.
Cela permet aussi de le différencier d'autres ateliers peints par Bazille :
L'atelier de la rue Furstenberg (au no 6) qu'il a partagé en 65-66 avec Monet qui était dans la dèche la plus complète, représenté ici à gauche,
et le studio de la rue Visconti (au no 20 de la rue Visconti) qu'il a partagé à partir du 1er juillet 66 avec Renoir, non moins dans la dèche, (ci-contre à droite)
(Bazille ne le fut jamais, à cause de sa famille protestante aisée de banquiers montpelliérains, mais ce qui est formidable car rare, c'est qu'il en a fait toujours profiter ses amis en les hébergeant ou en leur achetant même des toiles, comme en 1867, à Monet à qui il paya deux mille cinq cents francs les femmes aux jardins).
L'atelier de la rue Furstenberg est aujourd'hui au musée Fabre de Montpellier,
Le studio de la rue Visconti est à Richmond au Virginia Museum of Fine Arts,
et l'atelier de la rue Condamine au Musée d'Orsay.
C'était bien situé, tout près du café Guerbois, 9 Grande rue des Batignolles, situé aujourd'hui au 11 avenue Clichy (il n'y a plus de café, mais une plaque rappelle son existence et son histoire).
Dans ce café se réunissaient pour boire, discuter, se chamailler, échanger idées et théories, batailler contre l'académisme, tous les jeunes artistes du moment.
Là est né ce qu'on appela donc " le groupe des Batignolles ". Son " noyau dur " était constitué par Renoir, Monet, Sisley, Bazille. Mais gravitaient autour, et non des moindres, Pissaro, Nadar, Degas (dont on dit que seul Bazille pouvait soutenir sa dialectique et son érudition), Zola (qui habitait à côté, 14 de la rue Condamine), et qui décrit ce café sous le nom de café Baudequin dans l'Oeuvre) et beaucoup d'autres comme Guillemet, Fantin-Latour, Edond maitre...
" le " fauteuil vert, car on le retrouve dans d'autres tableaux...
Échanges amicaux et clins d'oeil : c'est Manet qui a peint Bazille. On peut s'en rendre compte en voyant l'original du tableau et de près : la facture n'est en effet pas celle de Bazille lui-même.
Mais ce n'est pas la seule surprise de détail que nous réserve ce tableau.
Que dis-je ce tableau ! Et tous ceux qui sont sur les murs ?