jeudi 29 décembre 2005 dernière page Avant dernière page
An est fait
comme le dit mon ami Vincent Cordebard.
Pas envie de faire de bilan, de synthèse, ni de prendre de résolutions.
Un peu de mal même à envoyer je ne sais quels voeux précis aux amis. Bien sûr que j'espère pour eux santé, bonheur et tout ce qu'ils désirent...Mais ces mots sont tellement recouverts et vagues...
À quoi bon les répéter, mes destinataires savent bien que je ne leur veux pas de mal...
Derniers jours occupés par mes deux filles...occupantes et occupatrices, surtout des écrans. Quatre pour trois, c'est un peu bataille...
Aller visiter la grand-mère à Verneuil sur Avre, m'inscrire sur les listes électorales, aller voir Harry Potter (long et pénible comme d'habitude)...
Je voulais en parler avant la fin de l'année
- des illuminations délirantes de Neuilly sur Eure, où je n'emmènerai pas cette année mes filles (elles ont vu une fois, elles n'ont pas envie disent-elles de le revoir). Ma visite un soir gelant avec Sandrine H. dériva sur Nathalie Le Berre qui peint des ours ( mais pas que ça, faut que je le dise, sinon elle va encore s'emporter dans un mail furieux...)
Imagerie débile, féerie de pacotille, automates de garages, fête foraine ringarde, fausse fête, médiocres noëlleries, le tout pour attirer du monde, et faire marcher les commerces du village. Encore un syndrome délirant du Perche. Croient encore que c'est en multipliant les ampoules qu'on fait plus de lumière...
Il n'y a que les tous petits qui puissent être encore émerveillés...
-de la meilleure pizzeria de Montpellier, où Christian et Muriel m'invitèrent lors de mon dernier séjour. 14 places, un seul service, tout petit. Il faut donc réserver. Un décor comme on n'en fait plus (photo d'Antonin Artaud sur les murs), un patron qu'on n'oublie pas dès qu'on l'a rencontré, un lieu où on discute, où on peut écouter de la musique, rester le temps qu'on veut (pas de deuxième service), aimer ses amis, refaire le monde, puiser dans une ambiance.
Si si... c'est une pizzeria, et on y mange très bien (y'a pas que des pizzas d'ailleurs...) et certains clients ont laissé des traces sur les murs dehors... et dedans.
Avec un patron qu'on ne remplacera pas...
Avant de partir il m'offre un livre et nous raconte une épitaphe qui l'avait marqué :
" Ci-gît un pêcheur émérite
dont le bonheur touche à l'extrême
Car depuis qu'il repose ici
Il fait ses asticots lui-même."
Il me la marque même sur un papier.
- De ces quelques photos inédites
de Pierre Michon

mais en discussion avec qui ? (indice : conduit à Chloé Delaume)
Sur le même fauteuil, Maurice Nadeau et Anne Sarraute certes, mais la femme du milieu ? et le nom de son chat ?
- De ce titre d'Antonio Lobo Antunes : Bonsoir les choses d'ici-bas, offert par Edouard et Martine (avec le film de Scorcese sur Bob Dylan : No direction home).
" Larbaud gardait toute sa lucidité et sa mémoire, mais il avait sombré dans une confusion totale du langage, dépourvu de liens syntaxiques, réduit à des substantifs et à des infinitifs isolés, enfermé dans un mutisme inquiétant qu'un jour, brusquement, à la surprise de ses amis venus le voir, il rompit par cette phrase :
- Bonsoir les choses d'ici-bas.

Bonsoir les choses d'ici-bas ? Une phrase intraduisible."
Enrique Vila-Matas
Bartleby et compagnie.
Et de cet épigraphe (du même livre):
" Il y a des larmes dans la nature des choses et la certitude de l'éphémère trouble notre cœur."
Virgile