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Mardi 4 janvier 2005
suite de Bilan 2004 no 1.:
Ce " succès " rapide et effrayant à mon goût me posa quelques problèmes au début, car j'eus pendant quelques jours l'impression que 200 personnes étaient debout derrière mon dos, à lire par-dessus mon épaule, ce que j'écrivais.
Je ne me sentais plus libre, croyant entendre parfois leurs ricannements, leurs commentaires ou leurs critiques. Difficile de rester soi dans ces conditions, surtout quand on travaille à se chercher ou à être, à répondre à la question fondatrice de ce site personnel, et mise en exergue sur la page index.
J'ai toujours écrit, presque quotidiennement depuis à peu près l'âge de 14 ans. Pas forcément sous la forme d'un journal, mais sous la forme de notes, pensées, idées, poèmes, brouillons, " choses pour ne pas oublier", fasciné par les traces, seules preuves que j'éxistais bien, qu'il se passait " quelque chose". Écrire pour me chercher, me chercher dans ce que j'écris. Pratique personnelle vitale, comme l'oxygène, surtout quand on respire mal comme moi.
Mais ce journal en ligne, de par son instantanéité et sa lecture immédiate par d'éventuels lecteurs, est venu corser un peu mon problème. Il y avait une prise de risque supplémentaire. Comme une lettre mise dans la boite : une fois partie, c'est trop tard pour revenir en arrière.
Je pouvais certes effacer et modifier toute page, mais je m'en sentais alors coupable le lendemain, c'était comme une sorte de triche. Cela m'est arrivé deux fois d'effacer et de changer, mais à la demande de gens qui étaient concernés, et entre autre pouvant avoir des ennuis avec leur employeur, car cités ou facilement reconnaissables et identifiables. j'ai donc décidé à ce moment-là de ne plus citer que les prénoms ou de ne désigner les personnes que par leurs initiales en majuscule, à la kafkaïenne (Joseph K.) sans aller jusqu'à la contrainte formelle complete du Brésilien Bernardo Carvalho dans Les initiales, où non seulement les personnages mais aussi les lieux sont désignés par leurs initiales.
J'ai changé aussi (plus exactement recadré) deux photos, une dizaine de gens bien intentionnés m'ayant fait remarquer que les photos de mes élèves en ligne étaient susceptibles de m'attirer des ennuis. je connaissais bien les lois et le papier que signent les parents en début d'année pour autoriser ou interdire la mise en ligne des photos ou renseignements sur leurs enfants, mais j'avais jugé que ces photos étaient sans potentiel litigieux. Mais vu l'insistance de certains amis, j'ai rendu ces photos anodines et insipides.
Ce dernier mot me fait penser aussi au problème des pages que l'on trouve sans grand intérêt, sur le moment ou a posteriori, et donc aussi sans doute le lecteur. Même en postulant qu'on ne sait pas ce qu'il recherche ni ce qui l'intéresse, il n'empêche qu'il m'est arrivé de me sentir responsable de ma proposition journalière, angoissé de le décevoir, presque coupable au cas où je serais " mauvais ".
Je ne veux pas que ce journal devienne ni une corvée, une obligation, ni une lettre " sympa " avec " des mots sympas " adressée à d'éventuels "clients", cherchant à leur plaire, une suite de mots finalement sans intérêt.
Une des premières mesures fut de ne plus lire ou relire les pages antérieures écrites, sauf pour rechercher une référence ou faire un lien exact. Pratiquer le " c'est fait, c'est fait mais ce n'est pas une raison de recommencer."
Ah que j'appréhende le doute paralysant ! Je n'aime que l'action, le " faire ", la proposition, l'expérience, la recherche... Je déteste le repos, le recul, l'arrêt, les vacances...Les vacances ! Pour quoi faire ? Pour se reposer de vivre ? Pourquoi pas en profiter pour mourir tant qu'on y est !
Vivre fatigue Comme dit Jean-Claude Izzo (qui avait publié (Paysage de femme) lui aussi chez Guy Chambelland , l'ami et l'éditeur de mes 4 premiers livres, et dont j'ai pleuré longtemps le suicide !), Travailler fatigue , comme dit Cesare Pavese.
Bien sûr que certaines pages, certains jours ne sont pas intéressants en soi, mais ne sont-ils pas la trace de la difficulté d'accepter de vivre, quand même, jour après jour, de rester éveillé ?
Mais je ne veux pas non plus que cette astreinte quotidienne me conduise à la gratuité et l'inutilité. C'est pourquoi je ne vais peut-être plus suivre le quotidien, ni l'imposer. Il ne me semble plus obligatoire sous prétexte de vérité et de témoignage. C'est à lui de s'imposer s'il donne à rire ou à pleurer, à penser, révélateur d'une ambiance, ou créateur d'un entre-ligne possible.
Il m'est très vite apparu aussi que face à certaines questions ou réactions négatives (jalousie, incompréhension, moqueries, "Alors le blogueur, on blogue ?", "c'est un peu obscène de se montrer ainsi en public", "Et si tes élèves lisaient ton blog ?" etc.) la seule attitude était de ne pas en tenir compte, en se répétant qu'après tout, personne n'est obligé de lire mon journal dont on peut se déconnecter à tout moment. Je devais à tout prix garder mon indépendance totale, tout en respectant par ailleurs celle des autres, et que toute décision concernant ce journal ne devrait provenir que de moi et de moi seul.
Me répéter qu'il n'y a rien d'obligatoire.
Ce travail quotidien, fait au coeur de chaque nuit prend beaucoup de temps. On en arrive forcément à se demander à un moment ou un autre : " À quoi bon ? À quoi ça sert ? Pourquoi continuer ? " questions qui reviennent ensuite comme des bulles qui crèvent à la surface de la mare.
Temps pris sur la lecture, le cinéma, la campagne et les travaux quotidiens, le sommeil, les enfants, le courrier à répondre, etc.
Plus grave encore et perturbant pour moi : temps pris sur l'écriture du livre entamé, des films à monter, de la peinture abandonnée.
Y a-t-il un choix à faire ou tout fait-il partie d'un Tout ?