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Décembre 2004
Janvier 2005
février 2005
jeudi 25 novembre 2004.
L'impression est forte.
Depuis septembre je me suis installé à Nogent le Rotrou, ville que je ne connaissais que par mes visites espacées et vraiment occasionnelles à Edouard et Martine installés à Bueil, hameau situé sur la commune de Condeau, juste de l'autre côté de la limite du département, dans l'Orne.

Je m'aperçois que peu à peu mes parcours dans la ville sont les miens, toujours les mêmes, mes explorations orientées, que mes habitudes, mon regard, mes photos, mes états d'âme, mes lectures, participent à la création et à une vision personnelle du lieu. Mon intégration se fait investissement, réinvestissement, invention, imagination. Je réalise et soupçonne que je suis peut-être en train de faire un Nogent le Rotrou autant réel et concret qu' imaginaire et virtuel. Ce que me renvoient les gens d'ici que je rencontre, les collègues d'ici, et même Edouard et Martine, me montre que je ne vis pas dans la même ville qu'eux, qu'on y vit pas la même vie.
En soit cela n'a rien de nouveau ou d'étonnant, il en est peut-être de même partout et pour beaucoup de gens ou tout simplement chacun de nous. A chacun sa vision... correspondant simplement le plus souvent à sa vie ou la vision de la vie, sa vie intérieure, ses rêves, ses regrets et frustrations...et ses souffrances.

Début novembre, j'ai mis en ligne mon journal.
Rapidement, au fil des connexions, des jours, des décallages horaires, des pays ou continents, une foule d'évènements ou d'échanges, de coincidences, de liens, se sont tissés (puisqu'il s'agit de toile) autour de Nogent, à propos de Nogent, et de mon parcours géographique dans la région.
Il m'apparaît aujourd'hui que ce qu'on dit virtuel ne l'est peut-être pas tant que cela et est vite dit.
C'est incroyable par exemple le nombre de mails que je reçois, de gens que je ne connaissais absolument pas, pour me parler de Nogent le Rotrou ou de tel ou tel patelin des environs, mais tous accompagnés, sans exception, de souvenirs marquants, sensibles, affectifs...et toujours émouvants, jamais ridicules. Non seulement je m'aperçois qu'ils s'intègrent aussitôt et font partie de ma vie à Nogent, en lui donnant une dimension plus grande, mais qu'en plus, l'hypertexte du journal qui les envoie aussi ailleurs ou sur d'autres sites, leur a aggrandi à eux aussi (si j'en crois leurs mails personnels) depuis leur première connexion, leur "champ de vision"...ou leur "planète".

Il ne peut pas s'agir que d'un simple hasard. Trop d'émotions passent, d'affinités lumineuses, de parcours parrallèles différents mais à l'identique, trop de doutes communs, de livres communs, de références et de correspondances baudelairiennes, de questions ou d'attitudes communes face à la vie, à la politique, aux systèmes qui nous déterminent, trop de résistances et d'élans complices... Non. Internet n'a pas et n'isole pas l'individu.
Internet est vivant, créateur, imaginatif. Il peut permettre de résister au discours ambiant, de chercher, de réunir, d' explorer, proposer, informer...
Quoiqu'il fasse, il ne propose qu'un partage (puisqu'il est aussi facile d'y accéder que d'en sortir).

Je sais aussi ce que l'on peut en dire de négatif, les dangers, les excès... mais ce n'est que ce chacun veut bien y voir, et qu'on peut dire sur toute autre forme d'expression ou de communication. La littérature, le cinéma, la peinture, la télévision, la musique...ne sont que ce qu'un homme, l'homme, derrière une caméra, sur une feuille blanche, sur une partition ou sur une toile, a écrit ou proposé, mais aussi et surtout, à mon avis, ce que veut bien y voir ou y recevoir, l'"autre", en face, et ce qu'il en fait, détourne, utilise...et qui donc ne concerne que lui, ou pire en reflète.

La liberté ne supporte pas les frontières, les idées reçues, les idéologies, les religions...
Internet et les connexions que j'y fais ou cherche, les rencontres qui m'y arrivent correspondent à mon attente, me donnent des surprises comme je les aime, me permettent d'apprendre, d'apprendre à apprendre, de rencontrer des gens comme je les aime, qui pensent, qui sont créatifs, et qui partagent leur culture et leur difficulté d'être, leurs joies et leurs émotions, des gens qui me rassurent par les questions qu'ils se posent aussi, me font connaître des textes des musiques, des peintures...dont j'aurais toujours ignoré l'existence, et qui partagent.

Merci donc à tous qui partagent et proposent ce qu'ils sont, ils agrandissent mon espace de liberté et m'aident à vivre.
L'état du monde et le désastre ambiant sont par ailleurs si grands...